Parcours & Galères
20 balles sous la pluie
Y’a des souvenirs qui collent. Pas parce qu’ils sont beaux. Mais parce qu’ils te rappellent d’où tu viens. Ce jour-là, j’étais trempé, gelé, crevé. Mais j’ai serré les dents. Pour 20 balles. C’était mon premier taf au black, payé à l’arrache. Une mission à la con. Distribuer des flyers dans la rue, en plein mois […]

Y’a des souvenirs qui collent. Pas parce qu’ils sont beaux. Mais parce qu’ils te rappellent d’où tu viens. Ce jour-là, j’étais trempé, gelé, crevé. Mais j’ai serré les dents. Pour 20 balles.
C’était mon premier taf au black, payé à l’arrache. Une mission à la con. Distribuer des flyers dans la rue, en plein mois de novembre, pour une pizzeria qui avait même pas de site.
Le plan foireux d’un pote d’un pote
C’est toujours comme ça que ça commence.
Un pote qui dit : « Y’a un gars qui cherche quelqu’un pour filer un coup de main cet aprèm. C’est payé cash. » T’as rien à faire, t’as besoin de thunes, alors tu dis oui.
Le gars m’attendait devant la gare avec un carton rempli de tracts. Il m’a dit : « Tu restes là, tu souris, t’en files un max. Si y’en a plus à la fin, je te file un bonus. »
Spoiler : y’a jamais eu de bonus.
La pluie, les gens pressés, et moi qui souris pour survivre
J’étais là, debout sous la flotte, à tendre des bouts de papier à des gens qui n’en avaient rien à foutre. Certains prenaient le flyer par pitié. D’autres m’ignoraient comme si j’existais pas.
Et puis t’as les pires : ceux qui te regardent de haut. Ceux qui murmurent “il a qu’à bosser” sans savoir que c’est justement ce que t’es en train de faire.
J’avais froid. J’avais faim.
Mais j’avais aussi cette petite flamme en moi. Ce truc qui disait : « T’inquiète, tu resteras pas là. »
C’était peut-être pas grand-chose, mais ce jour-là, je suis rentré avec 20 balles et un peu plus de fierté que le matin.
La débrouille, c’est pas glamour
On parle souvent de réussite, de réussite « à la dure ».
Mais on parle rarement de ces petits boulots invisibles. Ces missions sous-payées qui t’apprennent plus que des cours magistraux.
Distribuer des tracts, faire des ménages, garder un gosse relou…
C’est pas sexy. C’est pas postable sur Insta. Mais c’est la vraie vie. Et parfois, la galère t’enseigne la dignité.
Aujourd’hui j’me rappelle de ce gosse trempé
Je repense à moi ce jour-là.
Ce gamin qui voulait juste pouvoir se payer un grec, ou un jeu en promo. Qui se disait que chaque billet comptait.
Et même si aujourd’hui j’rappe mes vérités, même si j’ai avancé, je garde cette scène dans un coin de ma tête.
Parce qu’elle me rappelle que tout part de là. De la rue. De la débrouille. De la pluie sur les épaules, mais la tête toujours relevée.