Julien, ce jour-là

Y’a des gens que tu croises, tu rigoles avec eux, tu traînes un peu… puis t’oublies.
Et y’a ceux qui marquent. Pas par ce qu’ils font. Mais par ce qu’ils t’empêchent de faire.

Ce jour-là, j’étais pas bien. Y’avait eu une embrouille à la sortie du lycée. Un regard mal pris, une parole de trop. Et moi, j’avais la rage au ventre. J’étais prêt à y retourner. À ramener un pote, à me chauffer. J’voulais montrer que j’me laissais pas marcher dessus.

Il m’a juste regardé. Et ça a suffi.

Julien m’a vu sortir du hall avec le regard noir.
Il m’a rien dit au début. Il m’a suivi. Et puis il m’a lâché une phrase simple. Pas un long discours. Juste :

« Tu veux qu’on finisse comme eux ? »

J’ai pas répondu. Mais ça m’a stoppé net.
Il parlait pas de ceux qu’on affrontait.
Il parlait de ceux qui tournent en rond. Qui vivent pour prouver qu’ils existent. Qui finissent au placard, ou en boucle dans les mêmes galères.
Et il voulait pas ça pour moi.

C’est pas un héros. Mais c’est un vrai frère.

Julien, il a pas la grande gueule. Il fanfaronne pas.
Mais ce jour-là, il m’a sauvé. Pas de l’autre gars. De moi-même.

Il m’a pas hurlé dessus. Il m’a pas retenu de force. Il m’a juste tendu un miroir, et j’ai pas aimé ce que j’y voyais. Alors j’ai fait demi-tour.
On n’a pas reparlé de cette scène.
Mais j’y pense souvent.

Des gars comme lui, faut les garder

Julien, c’est le genre de pote que les autres oublient de remercier.
Toujours là pour écouter, motiver, rassurer. Même quand lui, il va mal.
Il aurait besoin qu’on le booste, qu’on le prenne dans les bras… mais il pense toujours aux autres avant lui.

Et ce jour-là, il m’a appris un truc que j’oublierai jamais :

Le courage, c’est pas toujours de frapper. Parfois, c’est de renoncer.